INTERVIEW
DOMINIQUE BUXIN, part 3
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LIVE
FOR EACH MOMENT / VIVRE POUR CHAQUE INSTANT |
Doro : Comment s'est passée la rencontre avec JJ Burnel ? c'était
la 1ere fois que tu le voyais ? Est-ce que le contact a été
bon dès le début ? |
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Dominique
: Impeccable. Oui, cétait la première fois. Javais
eu loccasion de voir les Stranglers à Londres (en 79 ou
80), mais trop timide, je nétais pas allé le trouver
à la fin du concert. Jaurais pu me présenter au
contrôle, comme un «collaborateur» belge de JJ, mais
je suis resté comme dhabitude, «lhomme de lombre».
La première fois que jai donc rencontré Jean-Jacques,
cétait dans ce studio à Bruxelles. Le contact a
été de suite très amical, direct, réglo.
JJ ne jouait pas les stars, et de notre côté, nous ne jouions
pas les fans. Il sagissait dun travail déquipe
et dans mon esprit, tous les membres dune équipe doivent
être sur le même pied, même si certains jouissent
dune plus grande notoriété. Et ce doit être
le cas, me semble-t-il, de JJ.
ZAS. Je passe sur ce titre, puisque c'est un instrumental.
D
: Instrumental, certes, mais avec de superbes cris. La rencontre de
la machine et de lanimal.
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RENDEZ-VOUS : nouvelle version, très différente, de Logique
Polygonale (de Pragmatic Songs). Mais le texte ne change pas.
D : Non, cest le même. |
WINSTON & JULIA : Un des chefs-duvre de PS. En anglais.
C'était une demande du groupe ? Ou bien certaines chansons te viennent
en anglais, d'autres en français ? La voix de JJ est vraiment parfaite.
Pour moi, c'est un des plus beaux morceaux de PS, et le texte est une
très belle interprétation de 1984. |
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Dans
la question concernant les livres qui mintéressaient, jai
oublié de citer « 1984 » de George Orwell. Quel oubli
! Un livre à recommander à tout être humain qui
ne veut pas se laisser manger par le pouvoir et le contrôle quil
exerce sur nous. (Méfiez-vous des informations que vous laissez
en payant avec vos cartes de banque dans les magasins, aux péages
On vous suit partout. Big Brother/Web Brother/ Fric Brother, ils sont
partout). Orwell a TOUT COMPRIS. Il mérite le prix Nobel de la
Démocratie (il faudra le créer).
Le texte est le résumé du roman. Et il me semblait indispensable
dessayer de lécrire en anglais. La voix de Jean-Jacques
colle très bien aux paroles, à lambiance du morceau. |
KING OF HONG KONG Qui est ce roi de Hong Kong ?
D : Un simple jeu de mots avec « King Kong »
NBC GMBH. Dans les 1eres demos, il y a un refrain qui a disparu dans
la version définitive : Tout Va sauter. Je suppose que c'etait
une chanson de fin du monde (NBC = nuclear /bacteriologic / chimic),
avec l'énumération chaotique de tout ce qui va disparaître
?
D : Exact. Sais-tu ce qu signifie « GmbH »... En allemand,
cest lacronyme de « Gesellschaft mit beschränkter
Haftung », autrement dit : Société à Responsabilité
limitée. Tu vois le jeu de mots. On se lance dans la création
darmes dangereuses (de destruction massive, comme dirait lautre
abruti), on joue à lapprenti sorcier, et puis, on ne maîtrise
plus rien. Et tout peut sauter !
Comme disait Rabelais : « Science sans conscience nest que
ruine de lâme ». A méditer, si on a le temps. |
ACTION MAN : Un texte assez politique, dans la lignée de Plage
Privée. Tu pensais à quelqu'un de précis, ou juste
à un état d'esprit ?
D : Un état desprit. Quand on a bu un verre, on refait
le monde, mais lengagement est quelque chose de difficile.
Ou parfois on sengage sans trop savoir pourquoi. Cest le
second aspect de la chanson (« Je prends une carte dans chaque
parti »). Et ça, cest un peu le même thème
que « Lopportuniste » de Dutronc/Lanzmann.
Jaime beaucoup ces deux chansons.
NIGHT IS COMING ON. C'est une chanson de rupture ? Que veut dire la
phrase "Mens sana dans un corps de salaud" ?
D : Une rupture cynique de la part du gars. La chanson est articulée
autour de deux « effets » : les allitérations en
« s » et en « m » pour le couplet 1. Ensuite,
en « f » et « m » pour le couplet 2. Note
la référence à « Hiroshima » (une séquelle
radioactive passée dun chanson à lautre ?).
Le second « effet », est basé sur lexpression
« mens sana in corpore sano » que je transforme au gré
de la situation. « Mens sana /esprit sain dans un corps de salaud
» fait allusion au gars qui séduit une femme, juste pour
« tirer son coup ». Et puis qui se barre (« Mens sana
dans un corps en solo »). |
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LE TEMPS DU SWING. Beaucoup de jeux de mots dans ce texte, qui
n'est pas loin de certaines chansons de Bashung, je trouve. Ou même
Bobby Lapointe. Non ?
D : « Avanie et framboise » ou « Anastasie, lennui
manesthésie », deux chansons à découvrir.
Ah, ce vieux Bobby, toujours à la pointe des jeux de mots. Je
ny avais pas pensé en écrivant la chanson, mais
jaime bien Bobby Lapointe. De même que Bashung. Cette chanson,
« La nuit, je mens », il mest arrivé de lécouter
dix fois de suite, au moins. Quelle atmosphère. Et son album
avec Gainsbourg « Play blessures ». A écouter si
on a besoin dune bonne dose délectricité dans
le corps.
Dans « Le temps du swing » il y a beaucoup de calembours.
Mais à consommer avec modération (comme le camembert).
«Le temps du swing» parle aussi des zazous. Et qui dit «
zazou », dit Boris Vian !!
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JE
T'AI TOUJOURS AIMÉE
Curieusement, cette chanson est presque un morceau solo de JJ. C'est
lui qui chante, joue de la basse et produit. |
D :
Je nétais pas présent à ce moment-là.
Mais effectivement, Roger-Marc ma dit quil sétait
mis aux claviers et que JJ avait attaqué à la basse. Et,
coup de chance, hasard, ou « hasard objectif » (cf. les
surréalistes), le texte colle bien à lambiance de
la musique.
Jai écrit ce texte un dimanche après-midi, dans
un building, à Düren, en Allemagne (Allemagne de lOuest,
à lépoque). Dès que jai trouvé
la structure du morceau (celle du premier couplet), jai su que
je tenais le bon bout.
Le texte sest alors écrit quasi de lui-même. Il devait
sûrement déjà être en partie « dans
ma tête », car « jécris » presque
toujours un bonne partie du morceau « dans ma tête »
avant de le mettre sur papier. Ca ma déjà joué
des blagues, car je savais que javais trouvé quelque chose,
mais sans pouvoir men souvenir. (« Souviens-toi de moublier
», comme disait Gainsbourg).
Les gens qui connaissent PS citent souvent ce morceau comme un de leurs
préférés. Il a été repris par Dominique
A (Quelle coïncidence : Dominique A chante Dominique B). Et jai
vu sur Internet que Noël Akchoté en avait fait une reprise.
Mais je ne retrouve pas ladresse. Jaimerais bien lentendre,
car ce type, ça ma lair dêtre un fameux
gaillard très intéressant. (Sa version de Radioaktivität
de Kraftwerk , une véritable version post atomique !!). |
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Bon, revenons à l'année 1982. Le LP vient de sortir,
les critiques sont bonnes, le groupe part pour la première fois
en tournée, sans toi, puisque tu n'apparais pas sur scène.
Je suppose que tu étais quand même dans la salle pour les
grandes occasions, au Plan K à Bruxelles, par exemple ?
D : Pas au Plan k, mais jai vu le groupe à Gand, à
Anvers, en première partie des Stranglers, aux Halles de Schaerbeek,
avec Front 242. Je suis apparu, au fond de la scène pour «
RDA-RFA », et, intelligemment, jai fait semblant de chanter,
car je chante faux. Je les ai vus aussi dans les diverses émissions
télévisées ( Belgique, France, principalement). |
PARTIES
DANCE |
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Parallèlement à l'album sort une batterie de 45ts
avec 2 inédits en face B : RDA RFA et PARTIES DANCE (en fait, RDA RFA figurait déjà sur le maxi de Mothers
Little Helper). C'est ton expérience des allers-retours en train
Allemagne - Belgique ? C'est un morceau qui doit dater de 80, parce
qu'il y en a plein de versions différentes dans les archives
de PS.
D :
Pour les dates, le texte est enregistré à la Sabam en
1982 (28-7-82). Pour le contenu, en effet, jai souvent pris le
train Allemagne-Belgique et vice versa. Le thème évoque
les ambiances quon peu rencontrer dans les gares : mélange
de langues et de sonorités (couplet 1), mélange de vies,
de destins (Couplet 2), anecdotes (allusion aux Turcs-nombreux en Allemagne-,
aux miliciens belges, présents à lépoque,
à la nourriture le Schnell Imbiss est léquivalent
du fast food) (Couplets 3 et 4).
Cest une tranche de vie traduite en allitérations, avec
paroles extraites de la réalité : le passage en allemand
est lannonce faite aux voyageurs pour les prévenir que
le train va partir. |
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J'ai longtemps cru que PARTIES DANCE était totalement improvisé
par JJ, qui a l'air absolument stoned sur ce morceau. mais non, c'est
toi qui l'as écrit. Tu étais dans le studio ? En tout cas
c'est un très grand moment, avec JJ survolté.
D : Un texte primaire et un cri primal. Lhomme mis à nu,
en quelque sorte.
Le texte est assez cru, je le reconnais, même sil y a quelques
jeux de mots. Je ne crois pas que jétais présent à
lenregistrement, mais Jean-Jacques est effectivement en forme. Il
a dailleurs improvisé, je pense, les passages en anglais.
Le tout est assez direct, raide, ce qui est de circonstance, étant
donné le sujet. |
DETECTIVE PRIVE
Fire & Water, le LP de JJ et Dave Greenfield sort un an après,
en 1983. Tu y signes un texte extraordinaire : "Détective
Privé", avec une ambiance film noir qu'on retrouvera dans
"le Rocker de la CIA". C'est donc ta première collaboration
directe avec lui (avant Un Jour Parfait en 1989). Lui avais-tu proposé
d'autres chansons ? Il semble qu'il existe pas mal d'inédits
de cet album, toujours pas réédité en CD (comme
PS d'ailleurs...)
D :
Jean-Jacques mavait demandé des textes, lors dune
session du groupe, en studio. Je ne sais plus exactement quand. Il a
choisi « Détective privé » et en a fait un
chouette morceau. Il sagit bien dun ambiance « polar-
film noir ». A cette époque, ça me revient en écrivant
ces lignes, je lisais beaucoup de romans du genre « Série
noire », avec un intérêt particulier pour les romans
de James Hadley Chase. Un auteur à conseiller. Si on veut sen
faire une bonne idée, on peut par exemple lire « Pas dorchidées
pour miss Blandish ». Mais tous ceux que jai lus mont
vraiment bien plu. Toujours cette ambiance progressivement malsaine,
dans laquelle « le bon » ne lest pas toujours complètement,
tout en létant toujours un peu. Cest du solide. A
consommer avec du whisky (sec !). |
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